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Berlin 2022 / Montréal 2023 — I.B. (2023)

Action, re-documentation. Vitre sans reflet prélevée d’un encadrement d'œuvre picturale seconde main Blessure faite avec la complicité d’Ariane Gagné, et originellement élaborée pour être montrée à Gruentaler9, suivant l’invitation d’Adriana Disman et Anja Ibsch à participer à leur série commissairée, Buch Apotheke. 
















































calcul approximatif de la quantité de cigarettes consommées (2023)

Gravure laser sur vitre prélevée d’un encadrement d'œuvre picturale seconde main. Trois verres de vin issus de la performance except the bloodline (2023).

p. 283 (2023)

Intervention d’approximativement 175 cm. Réalisée par Raynald Masson, qui a aussi construit ce mur pour Le Lieu.

21:52 - 21:56 min. (2023)

Plus de 65 sacs de sucre renversés.

Cette image est une re-documentation et réitération d’une action faite un an plus tôt, pré-performance, à Berlin. J’avais été invitée par Adriana Disman à faire quelque chose, j’ai nommé la performance comme j’ai finalement nommé l’exposition au Lieu — des phrases sur la nature du feu, encore une citation d’I.B. Avant la performance, Ariane Gagné (qu’on voit dans l’image) avait accepté de me faire une marque, un tattouage sans encre, type de blessure que j’ai faite avant une performance en 2021, au Lieu, et lors ma toute première performance devant public, en 2016. Seulement, cette fois-là, en 2016, mes mains-mon corps n’était pas ceux d’un-e experte. Pourtant c’était bel et bien moi qui faisait tout en recevant.

Dans cette image je rejoue un geste ayant existé pour en dévoiler la trace, seulement. Une trace prouvant qu’elle ne peut pas avoir été faite de mes propres mains, par son emplacement. Quelque chose d’une violence latente aussi: une blessure déjà éxecutée, étant dévoilée à la fin d’une performance. Rien de grandiose dans le geste fait devant le public, rien d’impressionant de facto dans une quelconque capacité à se blesser devant public. 

Je documente un geste un an plus tard, je refais un geste dans un autre lieu, et c’est ce procédé, fait pour la caméra, qui revoie à un contexte puis à l’autre, et qui est mis en exposition.

L’anecdote est une boucle et cette documentation est fausse. Le geste initial — faire une blessure avant une performance, en 2022 puis en 2023 — n’était ni fait pour être documenté ni fait devant public. À Berlin, la phrase était dévoilée brièvement à la toute fin de la performance, à un public de personnes pour qui cette langue n’avait rien d’opaque.

Anja Ibsch m’avait expliqué la définition complexe du terme “Genie”. Quelque chose du geste de l’artiste - le corps de l’artiste, là où d’autres ont des corps. Depuis des années, je refuse une distinction entre le geste artistique et le geste psychiatrisé. Ici, je joue spécifiquement les codes du Body Art reconnu et célébré. Une blessure experte, reçue, belle, claire, documentée, imprimée, mise en exposition. Une blessure représentative, ou du moins monstrative. Des mains expertes qui font, un corps qui reçoit.

Ich habe Genie wo andere einen Körper haben — J’ai du génie là où d’autre ont un corps.

Celleux qui se blessent dans le cadre de leur pratique artistique ont du génie là où d’autre ont un corps. La distance entre le geste psychiatrisé de se blesser, et le geste souverain de la personne qui performe, est toujours agrandie. C’est cet écart (que je refuse) qui est ici rejoué, en produisant une fausse documentation. 

La phrase dans mon dos est une citation d’Ingeborg Bachmann, auteure étant à la base d’un processus réflexif et performative de trois ans, auteure qui a changé ma vie-ma mort, rien de moins.

L’image est captuée avec la caméra de Manoushka Larouche, une ami-e et artiste qui documente habituellement une bonne partie de mon travail. Là, c’est moi qui ai pesé sur le déclencheur, imprimé, puis mise en exposition l’image, au Lieu.